La formation d’un nouveau gouvernement est en cours et s’effectue dans un contexte économique dégradé. Le pays affiche déjà deux trimestres de croissance négative et tout porte à croire que l’avenir restera sombre un moment encore. Les Pays-Bas sont en récession, comme l’Allemagne, et le fait qu’il s’agisse d’une économie très exposée au contexte international laisse présager une année 2024 en demi-teinte sur le plan de la croissance. Les principaux marchés à l’exportation devraient ralentir cette année, qu’il s’agisse des voisins européens, des États-Unis ou de la Chine.
Le PIB hollandais terminera vraisemblablement 2023 sur une croissance d’à peine 0,2%. Il a commencé à reculer au cours du second trimestre de 2023, de sorte que le pays est officiellement entré en récession à l’automne dernier. Nous tablons toutefois sur une légère amélioration en 2024, à +0,7%, grâce aux mesures de soutien au pouvoir d’achat que devrait prendre le nouveau gouvernement, une fois formé. Le marché du travail reste également bien orienté, avec un taux de chômage toujours très bas (3,6%) et des salaires qui devraient rester élevés. La confiance des consommateurs fortement ébranlée par la pandémie en 2020 est en train de s’améliorer un peu, aidée par le ralentissement notoire de la hausse des prix et les perspectives de baisse des taux à venir.
La demande extérieure est une composante très importante de la croissance aux Pays-Bas car l’économie est extrêmement ouverte sur le reste du monde. La dégradation du climat international a fait de gros dégâts sur le rythme d’activité en 2023, car les exportations ont chuté de 10%, contre une hausse moyenne annuelle de 30% de 2020 à 2022. Les importations, qui dépendent du dynamisme des exportations et de la demande intérieure, ont connu une performance encore pire : elles ont chuté de 20% sur 2023, contre des hausses annuelles de pratiquement 40% précédemment. Ceci explique pourquoi le surplus de la balance commerciale a tellement progressé, passant de 6 milliards d’euros chaque année avant 2020 à plus de 11 milliards d’euros aujourd’hui.
Net reflux de l’inflation
L’inflation reflue nettement depuis octobre 2022, en ligne avec la décrue des prix de l’énergie sur les marchés mondiaux. Un pic proche de 15% a été atteint dans le courant de 2022, mais la détente s’est rapidement concrétisée, permettant de terminer l’année 2023 avec un rythme de progression des prix proche de 2%. L’inflation sous-jacente reste plus élevée, comme c’est le cas dans plusieurs autres pays européens, notamment parce que l’inflation dans le secteur des services se révèle plus tenace que prévu. Elle était toutefois redescendue de 7% (son plus haut niveau) à 3,5% au mois de décembre 2023. Pour 2024, la tendance devrait se poursuivre et nous tablons sur un taux d’inflation moyen proche de 3%, contre 4,2% en 2023.
L’immobilier à la peine, un phénomène temporaire
L’immobilier résidentiel a subi de fortes perturbations tout au long de l’année, en réponse aux hausses des taux d’intérêt observées sur les marchés. Les acheteurs sont devenus frileux, et les banques aussi, de sorte que les prix ont reculé légèrement, après avoir enregistré des hausses folles en 2020 et 2021. L’année 2023 s’étant achevée sur une belle détente des taux d’intérêt obligataires, l’immobilier semblait déjà reprendre quelques couleurs dans plusieurs pays, dont les Pays-Bas. En fonction de la tournure que prendrons les événements en 2024 sur les marchés financiers, cette tendance pourrait se poursuivre. Le cas échéant, le secteur de la construction pourrait voir ses perspectives s’améliorer, bien qu’il faille attendre une matérialisation de ces attentes pour être vraiment plus optimiste. Toute l’économie hollandaise pourrait profiter d’une légère amélioration, surtout si, comme les marchés l’anticipent, la Banque centrale européenne finit par envisager d’assouplir sa politique monétaire dans la seconde moitié de l’année, grâce à l’amélioration des chiffres d’inflation.
L’investissement des entreprises a, quant à lui, démarré 2023 sous de bons auspices, avant que les choses ne se dégradent suite à la détérioration de la confiance des patrons d’entreprises, découragés par le mauvais contexte économique international et la hausse du coût du crédit. Au final, l’investissement aura progressé d’environ 3% sur l’ensemble de l’année, ce qui est nettement plus élevé qu’en 2022. 2024 s’annonce par contre plus compliquée car il faudra du temps pour que l’effet des hausses de taux amorcée en 2022 s’estompe. Beaucoup dépendra de la tournure des événements au niveau international, dans un contexte géopolitique tendu.
Vers un léger déficit des comptes publics
Pour conclure, notons que le pays dispose d’énormément de moyens financiers pour relancer l’activité économique. La dette publique avoisine les 50% du PIB, tandis que le déficit budgétaire est pratiquement inexistant. La future coalition autorisera sans aucun doute un léger déficit des comptes publics, bien qu’il soit impossible de dire à combien il pourrait s’élever tant que le nouveau gouvernement ne sera pas formé : le chiffre d’un déficit proche de 2% du PIB est souvent évoqué. Ceci peut sembler élevé aux yeux des citoyens hollandais, mais il est à relativiser au niveau européen.