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BNP Paribas Fortis Economie
30.06.2017

Vers le début de la fin avec une croissance soutenue

La croissance aux Etats-Unis reste soutenue et devrait recevoir l’an prochain un coup de pouce supplémentaire grâce à la baisse des impôts promise par Trump. En Europe, la hausse nominale des salaires se traduit enfin par une croissance économique qui semble se maintenir. La Belgique suit le mouvement, entre autres à cause de la baisse du taux d’épargne, qui atteint de nouveaux abysses. Sur le plan de la politique monétaire, la BCE devrait commencer au début de l’an prochain à réduire son programme de rachat d’obligations. Cependant, le véritable changement viendra plutôt de la réduction relativement agressive du bilan américain, qui sera amorcée par la Fed en juillet, et qui devrait se traduire par un resserrement sensible des conditions financières. Ceci – combiné avec la mise en place des baisses d’impôts et la fin du cycle de croissance de dix ans – devrait se traduire par un ralentissement de la croissance américaine à 1,3% en 2019.

La croissance mondiale globale se poursuit, avec les Etats-Unis à la barre. Pour cette année, nous nous attendons à une croissance de 2,2% au pays de l’Oncle Trump. L’an prochain, elle devrait même atteindre 2,6% grâce au solide coup de pouce lié à la baisse des impôts. En 2019, la fête devrait être terminée avec un ralentissement de la croissance à 1,3%. L’effet d’adrénaline provoqué par la baisse des impôts s’atténuera, la hausse des taux et la réduction du bilan de la Fed se feront sentir, et après neuf années de croissance au-dessus du potentiel à long terme, il sera temps de faire une pause.

Une croissance européenne qui s’auto-alimente

Cette situation devrait sans aucun doute avoir un impact sur la croissance européenne. Mais remettons ces inquiétudes à plus tard. Pour l’instant, nous profitons en Europe d’une reprise solide qui – une fois n’est pas coutume – s’explique par la demande intérieure. La consommation augmente à cause de la baisse du taux d’épargne, qui compense la hausse de l’inflation, qui à son tour érode lentement le pouvoir d’achat. Au cours des prochains trimestres, la hausse nominale des salaires devrait reprendre ce rôle dans cette reprise qui s’auto-alimente. Cette année, la croissance devrait atteindre 1,9%. En 2018, elle devrait rester tout aussi solide, à 1,6%.

La hausse des salaires se trouve certainement dans les cartes de l’Allemagne. Le marché de l’emploi très étriqué devrait enfin pousser les salaires vers le haut. Ce qui ouvrira la porte à une nouvelle ère. Ces trente dernières années, les salaires ont été maintenus sous contrôle pour des raisons de compétitivité. Conséquence : un surplus commercial solide et de la désinflation sur le continent européen. On devrait en voir la fin. La forte augmentation du nombre de migrants crée une nouvelle hausse de la demande. Cette forte consommation intérieure pousse les importations à la hausse et réduit le surplus commercial. Finalement, le pays deviendra la locomotive de la zone euro – et non plus un simple wagon. Et avec un peu de chance, Donald Trump devrait tweeter que finalement les Allemands ne sont pas « aussi mauvais que cela ».

Spécifiquement belge

Malgré le fait que nous nous trouvions encore en mode d’économie, la Belgique ne s’en sort pas trop mal, avec une croissance de 1,5%. La forte consommation intérieure est aujourd’hui soutenue par les investissements des entreprises. Ceux-ci se normalisent grâce au taux élevé d’utilisation des capacités et les emprunts augmentent parallèlement à la hausse des marges brutes d’exploitation. Ce qui est remarquable avec ces crédits, c’est l’évolution sensible (positive) du bilan total des banques belges depuis 2014. Depuis quelques années – et aujourd’hui encore – elles peuvent supporter une expansion plus rapide de leur bilan. Il faut dire que les fortes réductions de bilan intervenues pendant la crise étaient du jamais vu. L’assainissement rapide, combiné avec une solide recapitalisation et la baisse des taux, a boosté rapidement la rentabilité. Dans ce sens, l’évolution des banques belges est comparable à ce qui s’est passé aux Etats-Unis. Dans bon nombre d’autres pays européens, cette correction n’a pas été réalisée – ou à peine – ou les réductions de bilan se poursuivent.

Taux d’épargne historiquement bas

Une autre caractéristique de la Belgique, c’est la baisse rapide – et exceptionnelle – du taux d’épargne des ménages. Le taux d’épargne net européen a également baissé, mais alors qu’en 2012 il était encore inférieur au taux d’épargne belge, il se situe aujourd’hui 2% au-dessus du taux d’épargne belge (qui est actuellement de 3%). Le taux d’épargne est influencé par différents facteurs, les taux d’intérêt historiquement bas ayant joué un rôle majeur depuis 2010. En effet, la majeure partie de l’épargne provient des revenus des capitaux. Ceux-ci ont fondu ces dernières années, provoquant une baisse du taux d’épargne. Le niveau de confiance dans l’économie et le marché de l’emploi expliquent que ce taux d’épargne ne devrait pas augmenter sensiblement dans l’immédiat. Le vieillissement de la population, avec la baisse du nombre d’épargnants – soit la population entre 25 et 60 ans – continue à peser sur le taux d’épargne.

La faiblesse du taux d’épargne des ménages est-elle un problème ? Pas nécessairement, si elle est compensée par les entreprises et les pouvoirs publics. Les bénéfices et les flux de trésorerie des entreprises atteignent aujourd’hui des sommets. Le gouvernement affiche encore un déficit budgétaire important. Malgré tout, sur base du compte courant positif, la Belgique n’est pas obligée de se tourner vers des capitaux étrangers pour financer ses investissements. Si c’était le cas, et ce, pour une longue période, nous serions plus dépendants des caprices de ces investisseurs.

Il n’empêche que ce serait malgré tout une bonne idée de ne pas laisser glisser davantage ce taux d’épargne. Parmi les mesures permettant de le maintenir à un niveau acceptable, on peut penser par exemple à rendre les pensions complémentaires (de l’employeur) obligatoires et à conserver le régime fiscalement avantageux appliqué à l’épargne pension individuelle. Cela aiderait à garder la facture des pensions plus soutenable. Il faut y ajouter des mesures fiscales qui encourageraient les investissements dans des projets favorisant la croissance – donc un peu plus risqués qu’un compte d’épargne – et faire ainsi d’une pierre deux coups.

Resserrement monétaire

La politique monétaire constitue le vrai défi pour le second semestre de cette année. La BCE devrait certainement se contenter d’un statu quo. Elle amorcera ensuite une lente réduction de son programme de rachat d’obligations. La banque centrale américaine (Fed) a une bonne longueur d’avance dans la normalisation de sa politique. Nous nous attendons encore à un relèvement des taux en fin d’année, et à quatre hausses l’an prochain.

Plus importante encore, l’annonce récente de la réduction du bilan de la Fed. Nous nous attendons à ce que la banque centrale américaine démarre son programme dès le mois de juillet. Nous pensons que la politique actuelle – où les banques reçoivent un dédommagement sur leurs réserves excédentaires – sera également maintenue. Ainsi, le bilan (astronomique) de 4.500 milliards de dollars ne devra pas être exagérément réduit. Cette réduction se fera pourtant rapidement, a indiqué la Fed lors de sa dernière réunion de fixation des taux : beaucoup plus vite que prévu. Conséquence ? Une augmentation du taux à long terme de 90 points de base, ce qui implique un resserrement sensible des conditions financières. La présidente de la Fed, Yellen, pense que chaque augmentation du taux à long terme de 15 points de base ira de pair avec 2 hausses de 25 points de base du taux à court terme. En tout, cela donne 12 (!) hausses de taux. Et vu que le marché anticipera rapidement sur la réduction de bilan, nous nous attendons à ce que le taux à long terme américain se retrouve au-dessus de 3% d’ici la fin de l’année, contre 2,2% aujourd’hui. En 2018, ces hausses pourront encore être compensées par les baisses d’impôts, mais leur effet s’éteindra en 2019. Le message est donc : profitez de la forte croissance tant qu’elle persiste !

 

« When Paradigms fall »

Nous vivons dans un monde de risques imprévisibles – mais aussi d’opportunités – sans précédent. Nous nous trouvons au cœur d’une spirale d’accélérations dont les principales sont la démographie, les changements climatiques et l’évolution technologique. Bien entendu, si vous vous trouvez tous les jours sur ce manège, il est difficile d’en évaluer avec justesse la vitesse et les conséquences. C’est pourquoi la réflexion s’impose. Mais il y a plus. Nous sommes encore les témoins de la plus grande expérience financière de notre histoire. Jamais auparavant, les banques centrales n’avaient réduit les taux à court terme à zéro, et les taux longs à un niveau proche de zéro, en rachetant massivement des obligations (assouplissement quantitatif). Aujourd’hui que l’économie mondiale semble clairement en meilleure santé, des questions se posent sur la « soutenabilité » de cette politique monétaire.

Et quel sera l’impact sur les marchés financiers si les banques centrales, à cause de la pression inflationniste, sont obligées de modifier leur politique ? Une chose est sûre : si nous considérons l’impact positif énorme des mesures prises par les banques centrales sur les marchés financiers, nous ne pouvons que conclure qu’une modification de la politique, aussi petite et progressive soit-elle, ira de pair avec une volatilité supérieure à la moyenne. Et qui dit volatilité, dit risque, mais aussi opportunité. Car lorsque les paradigmes s’écroulent, de la richesse se crée et se perd. C’est une histoire aussi vieille que l’humanité. Comment devons-nous nous positionner ? Nous préférons encore les actions aux obligations, même si une correction/consolidation des marchés d’actions est possible – et même probable – au cours des prochains mois. Les matières premières devraient afficher une belle croissance dans le contexte de hausse de l’inflation que nous connaissons. Et l’or est en bonne voie pour percer son dernier seuil élevé de résistance, à savoir 1.375 dollars/once. Et que penser du dollar américain ? Le grand marché « bull » du billet vert est-il terminé ? Nous essayerons d’apporter une réponse à ces questions – et à bien d’autres – lors de notre événement presse du mercredi 28 juin à 10 h 30. Et de vous donner au moins matière à réflexion.

Press Team

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